Bébert – René de Toussaint
Archives mensuelles : novembre 2023
1 Jour – La fête
réunion sur le PLUiH
Carnet noir
1 Jour – La Fête
1 Jour – Artax
1 Jour – 1 légende
par Paulette Laguerre
Les Dragons de Lombrives
Cette année là, dans les montagnes du Sabarthes, l’hiver fut terrible. Depuis de longs mois, un froid mortel y sévissait. L’Ariège charriait des blocs de glace. Les villages semblaient abandonnés. Seuls signes de vie : les minces filets de fumée grise qui sortaient des chaumières ensevelies sous la neige.
Au bout d’une route en lacets, dans la vallée du Vicdessos, se trouvait un château, dressé sur un piton, appartenant à la famille du sire Arnault de Montjaux. Plus lugubre que jamais, le donjon tombait en ruines faute d’entretien. Les caisses du seigneur étaient vides. Depuis des années, les armées arabes envahissaient régulièrement son pays. Rien, ni personne ne pouvait arrêter ces barbares venus d’Espagne. A leur dernière incursion de l’automne, telle une meute de rats voraces, ils avaient vidé les greniers de leurs provisions et s’étaient retirés en emportant tout le bétail. Ils n’avaient laissé derrière eux que terres brûlées et ventres creux.
Et, comme si ces fléaux ne suffisaient pas pour le malheur de ces pauvres gens, la peste noire frappa la population déjà affaiblie par la terrible famine. La panique fut totale : en plusieurs jours, les corps de centaines de personnes se recouvrirent d’affreuses plaques noires. Les moines allumèrent de grands bûchés où ils jetèrent les cadavres à tour de bras. Les maisons et les biens des pestiférés furent brûlés. La population abandonna les villages et dressa des camps en forêts. La maladie n’épargna personne, seigneurs et serfs, bourgeois et manants, dames et ribaudes tous furent atteints. Dame Edmonde, la jolie épouse d’Arnault, l’attrapa à son tour. Le seigneur, fou de douleur, fit venir un homme de grand savoir, un arabe apothicaire converti au christianisme.
— Ahmed, connais-tu un remède pour guérir Dame Edmonde ?
— Oui, il existe une médication à son mal.
— Il faut vite le lui administrer !
— Ce remède, Maître, se trouve dans la grotte de Lombrives où logent deux grands dragons. Leurs cornes sont réputées depuis l’antiquité pour leurs propriétés magiques. Seule une infusion de leur poudre pourrait guérir Dame Edmonde.
—Tu crois la chose possible ? Si nous osons nous attaquer à eux, ne vont-ils pas devenir fous furieux et tout dévaster dans le pays, créant plus de misère encore ? Le seigneur eut l’air inquiet puis, après une hésitation, il ajouta :
— Pas un, de mes soldats ne sera assez courageux pour rentrer dans cette grotte et combattre ces bêtes bardées d’écailles et crachant le feu.
— Maître, pensez au trésor, offrez à ceux qui rapporteront les cornes, une part des pépites d’or que renferme cette grotte.
Ce trésor remontait à l’aube des temps. Hercule revenant de Gibraltar, fatigué d’avoir séparé, d’un coup d’épaule, l’Espagne de l’Afrique, s’arrêta pour se reposer dans le château du roi Bebrytx, dans la verte et sauvage vallée de l’Ariège. Il tomba amoureux de la fille du roi, la belle princesse Pyrène aux cheveux d’or. Ils vécurent un grand amour. A la mort de la jeune fille, tuée par des loups, Hercule construisit un caveau dans une des plus vastes grottes connues des hommes, pour que Pyrène y reposât en paix. Il laissa, pour gardiens du tombeau, deux magnifiques créatures ramenées d’Afrique, encore inconnues dans la région, une paire de redoutables dragons, la blanche Hermine et le noir Balthazar. Des êtres de chair et de sang, doués d’émotions et de pensées comme les humains.
Des siècles durant, la coutume voulut que les bergers viennent tous les ans pour l’Epiphanie «jour de l’annonce faite aux bergers de la venue du Christ » remettre leur tribut aux dragons : un petit coffret de pépites d’or, puisées dans le sable de l’Ariège, cette belle rivière, que nos anciens nommaient «L’Oriège ». En contrepartie les deux bêtes respectaient population et troupeaux. Pour cette cérémonie, ces montagnards revêtaient leur costume de fête, sous leur longue cape noire : la veste en peau de mouton, le pantalon de flanelle rouge, et leurs sabots à bouts pointus. Ils se coiffaient d’un grand béret noir légèrement penché sur le côté.
Les deux cerbères passaient des jours tranquilles dans leur antre. La blanche Hermine sortait parfois pour chasser dans les bois. Au passage, par beau temps, elle s’arrêtait pour s’ébrouer dans les marécages d’Ussat, à l’endroit où une source bienfaisante surgissait de terre, et répandait son eau chaude à l’odeur de soufre. Les paysans pouvaient voir son ventre incrusté de pépites d’or briller au soleil. D’un tempérament affable, elle vivait en bonne intelligence avec la population, et entamait de temps en temps la conversation avec les bergers gardant leur troupeau. Le noir Balthazar, d’un caractère plus sauvage, n’était pas sorti de sa grande cavité depuis plus d’un siècle. Beaucoup de gens du pays le croyaient mort.
En ce début de l’an, le fief était à peu près dépeuplé ; ceux que la peste noire avait épargnés vivaient comme des animaux sauvages dans les trous de la montagne. Le seigneur, malgré sa grande peur du cataclysme que sa décision allait déclencher, écouta son conseiller. Dans l’espoir de sauver son épouse et ses sujets, il fit placarder un avis sur toutes les portes des églises du comté de Foix. Selon cet avis, Il promettait d’offrir une forte récompense, une partie du trésor de la grotte de Lombrives, en échange des cornes des dragons.
La nouvelle se propagea comme l’éclair dans le pays, et au-delà. De toute part, des aventuriers, des voleurs, des mendiants, des hors-la-loi accouraient à la recherche des bêtes cornues. Toutes les forges de la région rivalisaient dans la fabrication d’armes redoutables, pour pourfendre les gardiens du tombeau.
Avec une grande frénésie et poussés par l’appât de gain, des hommes partaient à la recherche d’Hermine. Ils s’aventuraient dans cette vallée sauvage, remplie de marécages. Beaucoup laissèrent leur vie dans ces expéditions, dévorés par les nombreux lynx, loups et ours, que le rude hiver obligeait à descendre des montagnes.
Une nuit, une bande de voleurs de grands chemins venant d’Espagne, plus hardis ou plus inconscients du danger, pénétrèrent dans la grotte pour surprendre Hermine endormie. A peine eurent-ils fait un pas dans le boyau, qu’ils réveillèrent les centaines de chauves-souris tapissant le plafond. Furieuses, les petites bêtes ailées fondirent sur eux, les mordirent de leurs incisives pointues : visage, cou, bras et mains. D’autres s’accrochaient aux cheveux des malheureux étrangers. Les hommes griffés, mordus, se réfugièrent dans une petite cavité. Là, une armée de rats, poussant des cris aigus et stridents se disputaient les reliefs du repas des gardiens des lieux. Les Espagnols durent écarter les rongeurs de leurs armes pour passer. Soudain, le sol trembla sous leur pas, ils s’interrogèrent du regard. Après une minute d’hésitation, malgré leur grande peur, les aventuriers décidèrent d’avancer
A leur arrivée dans la salle au trésor, l’atmosphère devint insupportable ; les Espagnols furent à moitié asphyxiés par une épaisse vapeur chaude au relent pestilentiel. De leurs flambeaux, ils balayèrent la cavité à la recherche des dragons, réveillant ainsi la blanche Hermine. Elle bougea, releva la tête, son odorat et son ouïe très développés l’avertirent du danger. En temps ordinaire, elle était une gentille créature, pacifique, elle ne combattait que rarement, préférant fuir devant l’ennemi, mais elle devenait très dangereuse si sa survie était menacée ou son territoire violé.
Tout en reniflant l’air, Hermine se dressa sur ses pattes arrière. A la vue des flambeaux, l’attaque en leur direction fut fulgurante. Comme l’éclair, sa longue langue recouverte de pustules et hérissée de piquants pourchassa les hommes, les obligeant à courir dans tous les sens à la recherche d’une cache pour se protéger. Elle cracha sur eux un souffle de vapeur bleutée, qui transforma les fuyards en momie de glace.
Les cris d’effroi des survivants, repris par l’écho, réveillèrent le grand dragon noir.
Depuis plus d’un siècle, Balthazar dormait sur son lit d’or. Il sentit le danger de l’intrusion humaine vers son trésor. Il se leva en poussant un grognement qui fit trembler tout l’édifice. Sa tête touchait presque la voûte, Ses énormes yeux accoutumés à la nuit lui permirent de repérer les hommes. Il souffla et cracha dans leur direction, un torrent de flammes. Les rescapés furent transformés en torches. La montagne tremblait, des bruits à percer les tympans sortaient des entrailles de la terre. Cette expédition espagnole, refroidit l’ardeur des aventuriers les plus téméraires.
Au printemps, les frères Fournier, deux bergers du village de Lapège, connaissant les mœurs de la femelle, attendaient leur heure. Comme tous les ans, dans les boues chaudes d’Ussat, elle vint pondre son œuf. Quand la blanche Hermine se trouva en position de faiblesse à moitié paralysée par la douleur, ils profitèrent de ce qu’elle ferma les yeux sous l’effort, pour lui enfoncer un pieu dans chaque œil. Les deux pastoureaux scièrent les cornes d’Hermine et quittèrent rapidement les lieux pour porter leur trophée à l’apothicaire et recevoir leur récompense. Les villageois qui avaient assistés de loin à la mort d’Hermine accoururent et ce fut la curée pour arracher les pépites d’or incrustées sur son ventre. Soudainement, le ciel au-dessus d’eux s’obscurcit, comme si la nuit venait de tomber. Un vent tourbillonnant pliait les arbres. Les détrousseurs levèrent les yeux. Ce qu’ils virent les terrifia : un immense dragon noir, d’une envergure impressionnante planait au-dessus des montagnes. Pour la première fois, la population voyait la terrifiante bête ailée. Toute la nuit, Balthazar fouilla les forêts, les étangs, les marais. Ce ne fut qu’au petit matin qu’il retrouva la dépouille d’Hermine, à moitié dévorée par les loups. La folie le gagna. On pouvait, à des centaines de kilomètres à la ronde, entendre ses hurlements. De grandes flammes s’échappaient de ses naseaux formant un véritable rideau de feu. Sur son passage, les forêts s’embrasaient, puis, il arracha avec sa gueule des pierres à la montagne, qu’il recracha sur le château, obligeant ses hôtes à s’enfuir dans les souterrains. Le clocher de l’église s’effondra sur les paroissiens venus s’y réfugier. Les habitants rescapés montèrent se cacher dans les nombreuses cavités tapissant les flancs de la montagne d’Ussat.
Puis Balthazar se calma, du moins il le feignit car, en réalité, naissait en lui un désir de vengeance contre ce châtelain et ses sujets, pour le sort terrible qu’ils avaient réservé à sa blanche compagne. A partir de ce moment-là, Balthazar exigea que lui soient donnés de jeunes hommes pour ses repas. Si on refusait, il menaçait de détruire le pays. La population dut donc accepter ce lourd tribut dans l’espoir que le dragon se lasserait de la chair humaine et réclamerait vite un cochon bien gras.
L’épidémie de peste achevée, à l’approche de l’été, la terre se remit à tourner au rythme du soleil et des saisons et pour nos braves montagnards, le travail n’attendait pas.
Mais pour leur malheur, la bête ailée était toujours là avec les mêmes exigences. Trop pauvres pour quitter le pays, les malheureux montagnards ne savait plus vers quel saint se tourner. Ils avaient tout essayé : prières, offrandes, pèlerinages, et même les philtres des sorcières ; rien n’avait débarrassé le pays du monstre sanguinaire.
Un jour une nouvelle stupéfiante fit le tour du comté de Foix : Le dragon exigeait qu’on lui offrît en sacrifice, en plus des garçons : la fille unique du seigneur Arnault de Montjaux. Cet effroyable envoyé du Diable demandait toujours plus d’impôts sanglants.
Après que Balthazar eut avalé un jeune pâtre et ses moutons, les villageois allèrent voir leur seigneur :
«Maître ce dragon laissé par le héraut Hercule est devenu fou. Il doit disparaître. »
Le conseiller du seigneur eut une idée :
— Avant que ce monstre n’ait dévoré toute la jeunesse, demandons secours à Hercule, son ancien maître, le pourfendeur de l’hydre ; lui seul, possède la force de combattre et de terrasser ce démon sanguinaire.
Les montagnards montèrent sur le plus haut sommet, le Mont Valier, et à grands coups de hillet (1) appelèrent Hercule à leur secours. Comment le héraut grec entendit les cris de désespoir des Ariégeois depuis la Grèce, cela reste un grand mystère encore de nos jours. Mais le fait est que, par un prodigieux effort dont il était seul capable, il franchit les plaines, les rivières et les nombreux marais disséminés sur son chemin. Comme poussé par le puissant vent, il arriva en un instant, devant la grotte de sa bien-aimée.
Sans perdre de temps, de plusieurs coups de massue, Hercule cassa la montagne de granit et lança sur la bête folle, des blocs de plusieurs tonnes. Le monstre paraissait indestructible, il ne bougeait pas.
Debout sur ses deux pattes arrière, les écailles en batailles doublant de volume, Balthazar essayait d’impressionner et de faire reculer Hercule. Devant son échec il cracha du feu ce qui ne se découragent pas le héraut grec, il attaqua à grands coups de massue le dragon aux pattes, le forçant à se baisser. Le Grec profita que la bête était tombée à genoux pour monter sur elle, en s’accrochant à ses écailles. Puis à la force de ses poignets IL grimpa le long de son dos. Balthazar se secouait, frappait le sol à grands coups de queue. Sous le coup d’une terrible colère, il s’envola et alla d’une paroi à l’autre de la cavité, décapitant au passage stalagmites et stalactites. Hercule ne décrocha pas, il continua d’effectuer sa longue ascension. Quand il atteignit enfin le sommet du cou, il se redressa et d’un seul coup de massue, lui fendit le crâne en deux.
Hercule tira le grand dragon noir de la tombe de sa bien-aimée. Il recouvrit sa dépouille de milliers de blocs de granit, pèle mêle, jusqu’à atteindre le bleu du ciel. Cette immense sépulture allait de l’océan Atlantique à la mer Méditerranée, Hercule l’appela : « Les Pyrénées » En souvenir de la fille du roi Bebrytx, la belle princesse Pyrène aux cheveux d’or.
Sur chaque sommet Ariégeois les hillets des montagnards retentirent joyeusement, annonçant la bonne nouvelle aux gens du comté de Foix.
Cric crac moun counte es acabatch – cric crac mon conte est terminé
1 – Hillet : cri qu’utilisent les bergers pour communiquer d’une montagne à l’autre
1 Jour – 1 Gourbitois
1 jour Artax
Gourbit 1902 – 1905
Le 19 mars 1902 : arrêté du maire : Il est interdit de jeter par les fenêtres sur la rue publique : les balayages des maisons, les eaux ménagères, les immondices et tout autre objet dans les abreuvoirs. Le 8 février 1902,demande du conseil municipal aux Eaux et Forêts d’écobuer les quartiers de Labourière, Courtal d’Abal et Labézounet afin de supprimer les genièvres qui envahissent les pelouses. La commune s’engage à protéger les jeunes plants de hêtres ou autres essences avec la présence d’une quarantaine de personnes. (Écobuage : procédé de culture qui consiste à peler la terre. On enlevait les mottes avec les herbes et racines, on brûlait le tout, puis on répandait les cendres sur le sol pour le fertiliser).
Le 15 octobre 1903 : inauguration de la ligne de chemin de fer de Foix à Saint-Girons (par prolongement de la ligne de Foix à La Bastide de Sérou).
Le 7 juin 1904 : arrêté du maire : la couverture ou la sous couverture de paille des maisons, granges et étables sont interdites. Été caniculaire.
Dans un journal de l’Ariège de 1905 : on peut lire cette prophétie : En 1950, l’homme sera en grande partie maître des variations climatiques… Faute de pouvoir encore gouverner souverainement les caprices du ciel et de l’atmosphère, nous saurons au moins les prévoir, dans une certaine mesure, et prendre nos dispositions en conséquence.
Le 8 avril 1905 : arrêté du maire :
1/ Tous les chiens sans exception devront porter une muselière et être munis d’un collier portant le nom et l’adresse du propriétaire.
2/ Les chiens errant sur la voie publique n’ayant pas de collier seront ramassés et abattus.
3/ Chaque soir à la tombé de la nuit, tous les chiens devront être enfermés et relâchés au soleil. Tous les chiens sauf ceux de berger seront tenus en laisse.